Etude de cas

Maladie professionnelle, les conseils d'un avocat

A quel moment un salarié sait-il si sa pathologie est une maladie professionnelle ? La reconnaissance des maladies professionnelles et les démarches qui y sont associés peuvent donner du fil à retordre pour les salariés, qui ont un besoin urgent de conseil. Nous avons interviewé un avocat, Maître Bruno Louvel pour en savoir plus. 

Maître Bruno Louvel est avocat depuis 2004 et est associé au sein d'un Cabinet dédié exclusivement au droit du travail et au droit de la sécurité sociale. Son cabinet, situé à Rennes et à Brest est à dominante contentieuse.

1) Comment un salarié peut savoir s’il est victime d’une maladie professionnelle ?

Le premier réflexe est de consulter les tableaux des maladies professionnelles disponibles sur le site de l’INRS qui pour chaque maladie fixe des conditions (délai de prise en charge, durée d’exposition au risque, et liste des travaux).

Si les conditions mentionnées dans le tableau sont remplies, la maladie sera considérée comme professionnelle.

En revanche, si une condition fait défaut, c’est le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (composé d’experts médicaux) qui rendra un avis sur le lien de causalité entre la maladie et le travail habituel du salarié.

Pour les maladies qui ne figurent  pas dans un tableau c’est ce même comité qui se prononce.

Mais dans ce cas, il faut que le salarié puisse justifier d’une part, que la maladie est «essentiellement et directement causé par son travail habituel » et d’autre part, d’une incapacité permanente d’un moins 25% ou que la maladie ait entrainé son décès.

Le plus souvent, c’est le médecin traitant qui à l’occasion d’une consultation conseillera son patient sur la pertinence de déclarer une maladie professionnelle soit parce que la première manifestation clinique est constatée soit parce qu’un arrêt maladie est envisagée.

2) Pensez-vous que l’état actuel du droit et les tableaux annexés au Code de la sécurité sociale sont suffisamment protecteurs ?

Pour l’essentiel, en ce qui concerne les pathologies corporelles les tableaux sont nombreux et couvrent de nombreuses pathologies.

Le recours au comité régional est censé permettre d’étendre la protection en permettant la prise en charge de maladies hors tableaux.

Mais, il faut avouer que le dispositif de reconnaissance des maladies professionnelles est complexe et peu accessible.

Quant à l’intégration des maladies psychologiques dans les tableaux c’est sans doute une évolution qui interviendra même si pour l’heure l’intégration du burn-out dans les tableaux a été écartée.

3) En quoi maladie professionnelle et accident sont-ils différents ?

On différence l’accident qui a un caractère soudain et la maladie qui apparait de manière lente et progressive.


Si on prend l’exemple d’un couvreur qui travaille sur une charpente :

• L’accident du travail typique c’est la chute soudaine du couvreur ;
• la maladie professionnelle la lombalgie chronique parce que ce même couvreur porte de manière répétée des charges lourdes.


4) D’après votre expérience, quand est-ce qu’un salarié ayant une maladie professionnelle doit-il consulter un avocat ?

S’il estime que cette maladie est liée à une faute inexcusable de son employeur qui n’a pris les mesures qui s’imposaient pour éviter la survenance d’une maladie qu’il ne pouvait ignorer, une consultation est recommandée.

Si cette maladie est susceptible de donner lieu à un avis d’inaptitude médicale du médecin du travail, une consultation auprès d’un avocat est pertinente.

5) Quels recours peut exercer un salarié qui s’estime avoir été victime d’une maladie professionnelle après avoir guéris.

La guérison totale ou avec séquelle ne prive pas le salarié de ses recours.

Mais, comme les délais de prescription sont assez brefs (deux ans pour la faute inexcusable et un an pour la contestation du licenciement pour inaptitude), il est conseillé de  consulter le plus tôt possible un avocat pour déterminer les conséquences de la maladie professionnelle sur la relation de travail et sur la vie privée (garantie du contrat d’assurance couvrant un crédit immobilier par exemple).