Licenciement

Le licenciement sans cause réelle et sérieuse : Tout comprendre

Un licenciement valable est un licenciement justifié par une cause réelle et sérieuse. Mais qu'est-ce qu'une cause réelle et sérieuse ? Que signifie la notion de licenciement sans cause réelle et sérieuse ? Afin de comprendre cette notion il faudra se focaliser sur différents points. Notamment la définition du licenciement sans cause réelle et sérieuse, les motifs devant être présents au sein de la lettre de licenciement, l'indemnité dont pourra bénéficier le salarié mais aussi ce qu'il pourra faire s'il pense que son licenciement est injustifié.

Le licenciement correspond à la rupture du contrat de travail du salarié à l'unique initiative de l'employeur. Il s'oppose à la démission qui est du fait du salarié. Pour être valable l'employeur devra donner une cause réelle et sérieuse au licenciement de son salarié. A défaut le licenciement sera sans cause réelle et sérieuse ce qui entrainera le bénéfice de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse pour le salarié.

La notion de licenciement sans cause réelle et sérieuse

L'article L 1232-1 du Code du Travail dispose que le licenciement doit revêtir une cause réelle et sérieuse pour être justifié. Cependant, il n'explique pas la notion, ne donne pas les conditions à respecter pour que le licenciement soit valable. La jurisprudence est intervenue afin d'éclaircir ce qu'est un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

A- UNE CAUSE REELLE

La jurisprudence énonce que la cause doit être réelle, c'est-à-dire qu'elle devra être objective, existante et exacte. Elle doit relever de faits qui se sont réellement passés et non du ressenti de l'employeur. En clair votre patron ne pourra inventer des faits pour justifier votre licenciement ou encore vous licencier parce qu'il ne vous apprécie pas. Le motif du licenciement devant être d'ordre professionnel. La véracité des faits sera contrôlée par les juges du fond.

B- LA CAUSE SERIEUSE

La cause devra être sérieuse. Le caractère sérieux renvoie à un fait commis par le salarié ayant un certain degré de gravité. L'action du salarié devra rendre impossible le maintien de son contrat de travail, le fonctionnement de l'entreprise devra être affecté. Les faits ne seront donc pas anodins. Par exemple, il pourra s'agir d'un salarié ayant détourné les fonds de son entreprise. L'agissement représente un degré de gravité empêchant le maintien du salarié au sein de l'entreprise.

C- EN CAS DE DOUTE

Attention, le fait que le licenciement doit revêtir une cause réelle et sérieuse pour être justifié ne signifie pas que le salarié doit forcément avoir commis une faute. Un licenciement pourra être valide même en l'absence de faute du salarié. Ce qui peut notamment être le cas pour les accidents de travail répétés, pour les licenciements pour inaptitude.

Les motifs du licenciement

Le licenciement sans cause réelle et sérieuse sera reconnu quand, dans la lettre de licenciement, l'employeur n'énonce pas les motifs de la rupture du contrat de travail ou ces motifs sont imprécis.

Le motif du licenciement devra être :

  • Exact
  • Objectif et matériellement vérifiable
  • Précis
  • Avéré
  • Personnellement imputable au salarié

A- UN MOTIF EXACT

Le motif énoncé par l'employeur au sein de la lettre de licenciement doit représenter la vraie raison du licenciement. A défaut, l'employeur sera condamné à verser des dommages et intérêts au salarié pour réparer le préjudice qu'il aura subi. Les juges rechercheront la véritable cause du licenciement.


Exemple

Selon un arrêt de la Chambre sociale de la Cour de Cassation du 13 février 2008,  si l'employeur notifie comme motif une faute grave du salarié pour justifier le licenciement alors que les juges constatent qu'il a été licencié en raison du fait que son patron voulait supprimer son poste, le motif du licenciement est inexact. Le licenciement sera alors sans cause réelle et sérieuse. Le salarié pourra alors bénéficier de dommages et intérêts.


B- UN MOTIF OBJECTIF ET MATERIELLEMENT VALABLE

Le motif du licenciement ne doit pas ressortir de l'état des sentiments de l'employeur. Il ne pourra être subjectif et devra pouvoir être vérifiable par les juges. Le but étant de limiter les abus des employeurs.


Exemple

Il a été jugé par la Chambre sociale de la Cour de Cassation, le 29 mai 2001, que la perte de confiance n'est pas un motif objectif et matériellement vérifiable. Il en va de même pour le manque de motivation du salarié (arrêt du 23 mai 2000). Dans ces cas le licenciement sera sans cause réelle et sérieuse.


Les juges ne peuvent déroger au principe selon lequel le motif du licenciement doit être objectif et matériellement vérifiable. Le licenciement sera automatiquement sans cause réelle et sérieuse dans ce cas de figure.

C- UN MOTIF PRECIS

L'employeur doit étayer de manière claire ses propos au sein de sa lettre de licenciement. C'est-à-dire que la nature des erreurs ainsi que leurs dates devront être présentes au sein de la lettre. La date permettant au juge de vérifier les propos mais surtout de permettre au salarié de savoir immédiatement de quoi il est tenu responsable.


Exemple

"_D_es erreurs et des négligences" ne constitue pas un motif précis selon la jurisprudence de la Chambre Sociale du 7 décembre 1999. A contrario "le motif de participation à un mouvement de cessation collective du travail illicite" a été jugé assez précis.


D- UN MOTIF AVERE

Le motif du licenciement devra être connu, vrai et vérifié. Il ne pourra s'agir de simples craintes, de supputations voire de défiance. Le salarié devra réellement avoir commis un fait qu'il n'aurait pas dû dans l'exercice de ses fonctions.

E- UN MOTIF PERSONNELLEMENT IMPUTABLE AU SALARIE

Le motif du licenciement devra être imputable au salarié. C'est-à-dire qu'un salarié ne pourra être licencié à cause de fait commis par des membres de sa famille, une tierce personne. Le licenciement est une rupture du contrat de travail personnelle puisque touchant uniquement le salarié remis en cause. Si le salarié a été licencié pour un fait qui ne lui était pas personnel, le licenciement sera automatiquement sans cause réelle et sérieuse.

F- LA PLURALITE DE MOTIF

La jurisprudence a admis la possibilité, pour l'employeur, de faire référence à plusieurs motifs de licenciement quand ils sont inhérents à la personne du salarié. C'est-à-dire, par exemple, une faute combinée avec une inaptitude. Seuls des motifs personnels pourront être cumulés et non un personnel et un économique. Pour ce faire, l'employeur devra respecter 2 conditions :

  • Les motifs devront reposer sur des faits différents.
  • Les règles applicables à chaque cause de licenciement devront être respectées sinon le licenciement sera sans cause réelle et sérieuse.

Si les juges considèrent que l'un des motifs est insuffisant, ils examineront les autres.


Exemple 

Illustration à travers l'arrêt de la Chambre Sociale de la Cour de Cassation du 23 septembre 2003 : un salarié a été licencié pour faute et pour inaptitude avec reclassement impossible. Les juges ont examiné les motifs et ont écarté celui de la faute. Ils ont alors examiné l'inaptitude, qui a été reconnu. Le licenciement ayant alors une cause réelle et sérieuse.


Les mentions obligatoire dans la lettre de licenciement

A- L'IMPORTANCE DE LA LETTRE DE LICENCIEMENT

En l'absence de certaines mentions au sein de la lettre de licenciement, le licenciement pourra être reconnu sans cause réelle et sérieuse. La lettre de licenciement est très importante car elle va fixer les limites du litige. C'est-à-dire que l'employeur va notifier les motifs du licenciement et ne pourra revenir dessus en invoquant d'autres motifs lors du procès. S'il le fait le juge ne les examinera pas.

En fixant les limites du litige la lettre va permettre :

  • Au salarié d'être informé sur les motifs de son licenciement. En lisant la lettre, il doit comprendre immédiatement quels faits lui sont reprochés.
  • Au juge de vérifier la véracité des faits.

B- LA PROCEDURE A SUIVRE

La lettre de licenciement va indiquer les motifs objectifs, précis et vérifiables justifiant la rupture du contrat de travail du salarié. A défaut, le licenciement sera sans cause réelle et sérieuse. Ensuite l'employeur devra notifier au salarié le licenciement par lettre recommandée avec accusée de réception en application de l'article L 1232-6 du Code du Travail. La lettre ne pourra être expédiée _"_moins de deux jours ouvrables après la date prévue de l'entretien préalable au licenciement auquel le salarié a été convoqué."__

C- LES MENTIONS REQUISES DANS LA LETTRE DE LICENCIEMENT

A défaut de respect des mentions ci-dessous, le licenciement sera sans cause réelle et sérieuse :

  • Inscrire de manière explicite qu'il s'agit d'un licenciement
  • Les motifs du licenciement (fondamental)
  • Présence des indications quant au préavis à réaliser ou non
  • La signature manuscrite de l'employeur ou de la personne qui le représente et qui devra être mandatée. Attention la signature ne rendra pas le licenciement sans cause réelle et sérieuse car il s'agit d'un vice de forme. Cependant si le représentant de la personne n'a pas de mandat, le licenciement sera sans cause réelle et sérieuse.

Plus particulièrement, s'il s'agit d'un licenciement pour inaptitude professionnelle ou non professionnelle, la lettre de licenciement devra faire état de l'inaptitude (présence de certificats médicaux par exemple) et de l'impossibilité de reclasser le salarié. S'il n'est pas fait mention de l'impossibilité de reclassement, le licencement sera sans cause réelle et sérieuse.

D- LES MENTIONS INTERDITES

Certaines mentions sont prohibées dans la lettre de licenciement. A défaut, le licenciement sera sans cause réelle et sérieuse. Ces mentions sont relatées par l'article L 1132-1 du Code du Travail. Le motif du licenciement ne pourra avoir un caractère discriminatoire en s'attachant par exemple à l'origine de la personne, à ses convictions religieuses, à sa race ou à son ethnie, à son orientation ou identité sexuelle, à sa situation familiale, sa grossesse. En cas de licenciement discriminatoire il sera reconnu nul de plein droit. Le salarié pourra alors réintégré au sein de l'entreprise.

Le motif du licenciement ne pourra non plus énoncer des agissements relevant de la vie privée de la personne, en application de l'article 9 du Code Civil. Dans ce cas le licenciement sera sans cause réelle et sérieuse sauf si les agissements de la personne ont causé un trouble objectif caractérisé à l'entreprise. Ce qui peut aussi être le cas en raison d'un manquement à une obligation découlant du contrat de travail du salarié.


Exemple pour un manquement à une obligation découlant du contrat

Michel est routier depuis 20 ans au sein d'une société. Le week-end dernier, il était en repos et a conduit son véhicule ivre. Il s'est fait arrêté. Son permis lui a été retiré.

Le licenciement de Michel sera justifié. En tant que routier, il a besoin de son permis pour travailler. Même si le retrait de son permis a été réalisé en raison d'événements de sa vie privée, il entraîne l'impossibilité pour Michel d'exécuter les obligations présentes dans son contrat de travail.

Le licenciement de Michel a une cause réelle et sérieuse.


Que peut faire un salarié en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ?

En cas de suspiçion d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse par le salarié, il devra introduire une action en justice devant le Conseil des Prud'hommes. Pour ce faire il lui sera conseillé de se faire assister d'un avocat. Il devra rassembler le maximum de preuve qu'il détient afin de prouver que son licenciement est injustifié.

La question de la preuve du licenciement sans cause réelle et sérieuse

La preuve du licenciement sans cause réelle et sérieuse peut être apportée par tout moyen, s'agissant d'un fait juridique. C'est-à-dire que la preuve pourra être un e-mail, un SMS, divers documents comme une note de service... Les preuves devront être rapportées par l'employeur et le salarié. En droit commun, la charge appartient à celui qui réclame l'exécution d'un obligation selon l'article 1315 du Code Civil. Le juge prendra en compte les éléments de preuve apportés par les parties afin de juger si la cause du licenciement est réelle et sérieuse.

En cas de faute grave alléguée par l'employeur pour justifier le licenciement, seul l'employeur devra la prouver. Le salarié est déchargé de prouver quoi que ce soit.

En application de l'article L 1235-1 du Code du Travail, si un doute subsiste sur le caractère réelle et sérieux du licenciement, il profitera au salarié.

Les conséquences de la reconnaissance du licenciement sans cause réelle et sérieuse

En cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, en application de l'article L 1235-3 du Code du Travail, le salarié pourra être réintégré au sein de l'entreprise en conservant ses droits acquis. A défaut de volonté du salarié, de l'employeur ou des deux, il bénéfiera d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

A- L'INDEMNITE POUR LE SALARIE AYANT AU MOINS 2 ANS D'ANCIENNETE ET FAISANT PARTIE D'UNE ENTREPRISE COMPRENANT AU MOINS 11 SALARIES

Dans ce cas l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peut être inférieure aux 6 derniers mois de salaire brut perçus par le salarié. Les primes et les heures supplémentaires seront prises en compte par le juge pour évaluer le montant de l'indemnité.

L'employeur devra verser au salarié cette indemnité mais aussi celle de licenciement de l'article L 1234-9 du Code du Travail. Les indemnités sont donc cumulables.

B- POUR LES AUTRES SALARIES

Le juge évaluera l'indemnité du salarié en fonction du préjudice qu'il aura subi. Pour ce faire il pourra notamment prendre en compte l'âge du salarié, la difficulté qu'il aura à retrouver un emploi, la durée de son chômage, les avantages qu'il a perdu suite à son licenciement. Dans sa décision, le juge devra justifier le montant de l'indemnité qu'il accorde au salarié. Le salarié devant être intégralement réparé du préjudice qu'il a subi.

Conclusion

Pour être justifié, un licenciement devra avoir une cause réelle et sérieuse. La loi française a instauré cette notion pour contrôler les éventuels abus des employeurs quant au licenciement. En effet, le licenciement est à l'initiative de l'employeur. Pour éviter de trop nombreux licenciement, un usage excessif voire abusif, le Code du Travail requiert une cause réelle et sérieuse au licenciement. Le but étant de protéger les salariés qui représentent la partie faible au contrat.