Humour

Peut-on se balader nu sous sa robe d'avocat ?

« J’ai l’habitude d’être nu chez moi. Dans un souci de commodité, il m’arrivait très souvent d’enfiler ma robe d’avocat sans rien mettre en dessous. C’était plus simple. Mais jamais je n’aurai imaginé que ma robe se soulève un jour en pleine audience. »

C’est l’explication donnée par un avocat strasbourgeois devant la commission disciplinaire du barreau de Strasbourg suite à une découverte originale concernant l’exercice de son métier : l’avocat plaidait nu sous sa robe.

Une telle mésaventure traduit la spécificité d’une telle tenue dont la signification ne doit pas être mise de côté.

A) Une sanction pour une histoire farfelue

En pleine plaidoirie devant le tribunal correctionnel, la climatisation de la salle d’audience se dérégla.

Un vent conséquent traversa au niveau de la surface du sol. C’est alors que la robe de l’avocat se souleva.

Les magistrats outrés ont eu l’occasion de découvrir le « jardin secret » de l’avocat. Ce dernier pris alors ses jambes à son coup. Il quitta la salle, sans avoir, tant bien que mal, essayer de de remettre en place sa robe dans les couloirs du tribunal.

La formation disciplinaire du barreau se décida de le convoquer pour justifier de telles pratiques. Ce dernier fut finalement suspendu d’exercice pour 3 mois en raison d’un « comportement inapproprié dans l’exercice de ses fonctions ».

Une telle notion n’est pas hasardeuse lorsque l’on connait tout le symbolisme qui entoure la tenue d’avocat.

B) Un port strictement encadré

Le fondement de cette obligation vestimentaire n’est pas si vieux que cela : il découle de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1971.

Le costume de l'avocat est ainsi ordonné : une robe, des boutons, un rabat blanc et une épitoge. Dans certaines circonstances, pour les occasions solennelles, des gants blancs et un nœud papillon blanc peuvent être porté.

Les avocats sont des auxiliaires de justice. Lorsqu’ils accèdent à la profession, qu'ils prêtent serment de la manière suivante: « Je jure, comme avocat, d'exercer mes fonctions avec dignité, conscience, indépendance, probité et humanité ».

Le corps des avocats est unique et indivisible. La tenue vestimentaire met les avocats sur un pied d’égalité, identique pour les femmes comme pour les hommes, qu’importe la taille, la corpulence, la confession.

L’avocat qui retire sa robe pourra de nouveau être un homme dans sa singularité et s'exprimer, s’il le veut, sur ses convictions. 

Le principe de laïcité est ainsi mis en avant : les règles relatives à l’exercice de la profession justifient l’interdiction de tout signe religieux distinctif lorsque l’avocat porte la robe.

Le port de la robe est réglementé et uniformisé pour tous les avocats : aucun signe distinctif d’origine religieuse, philosophique, politique ou culturelle ne doit s’observer. Aucune décoration ou bijoux ne saurait être présent sur sa robe.

Ce sont les principes d’égalité et d’indépendance qui justifient que l’avocat s’abstienne du port de tout signe distinctif.

Il y'a bien d'autres raisons justifiant cela :

  • Les avocats sont traités de manière égale lorsqu’ils exercent leur fonction en public. Le port d’un signe distinctif rompt cette égalité,
  • L’avocat est le représentant, l’acteur d’une justice indépendante. Le principe d’indépendance lui impose, lorsqu’il œuvre ou représente ses clients, de ne faire état ni d’exprimer d’une manière ou d’une autre ses conceptions philosophiques, politiques ou religieuses,
  • Il faut aussi préciser que, il possède le monopole de la plaidoirie devant les juridictions,
  • Il a donc des obligations : il doit défendre ses clients uniquement avec le verbe et l’écrit. Il ne peut donc user de signes distinctifs ou à des symboles d’appartenance à un groupe ou à une communauté déterminée pour défendre ses clients.

Conclusion : Un avocat peut donc ne pas exprimer aussi librement qu’il l’entend ses opinions, idées, pensées sans craindre des représailles disciplinaires. Il peut donc être poursuivi pour atteinte à l’honneur et à la dignité de la profession.

Il n’est donc pas aussi libre de verbaliser publiquement ses opinions, pensées et critiques en dehors de sa profession sans risquer d’être poursuivi pour atteinte à l’honneur et à la dignité de la profession.

Il y’a donc des limites au droit d’expression de l’avocat, qu’il soit verbal ou physique.
Se balader nu sous sa robe en fait partie.