Abandon de poste

L'abandon de poste : une fausse bonne idée!

L’abandon de poste  vous fait de l’œil. Vous en avez assez de votre employeur. Ne démissionnez pas ! Pourquoi se passer d’une indemnité de chômage alors qu’on l’obtiendrait simplement en se faisant licencier.
Méfiance : le licenciement pour faute grave pointe le bout de son nez, adieu indemnités de préavis et de licenciement ! L’abandon de poste, une fausse bonne idée…

Court rappel sur la notion d’abandon de poste

L’abandon de poste est caractérisé dès lors que vous décidez de ne plus vous présenter sur votre lieu de travail, sans prévenir votre employeur au préalable.
Vous ne justifiez pas des raisons de votre absence alors que votre absence commence à devenir significative.
Dans la majorité des cas, vous décidez d’abandonner votre poste pour éviter d’avoir à démissionner et ainsi vous gardez le droit de bénéficier de vos indemnités de chômage.
Qu’encourez-vous à manquer à vos obligations contractuelles ?

Le risque de la qualification de démission

Comme vous le savez surement, la démission doit être sérieuse, certaine, claire et non équivoque.
Ce sont ces deux derniers critères qui vont poser le plus de problèmes.
La démission, pour être caractérisée, doit être claire et non équivoque, c’est-à-dire qu’elle ne se présume pas.
Ainsi, votre employeur ne peut pas déduire votre démission en observant que vous êtes absent depuis plus d’une semaine à votre poste, même si cette absence est injustifiée.
De ce point de vue, on peut penser que l’abandon de poste reste une bonne solution lorsque vous voulez quitter l’entreprise en gardant les avantages liés à un licenciement.
Cependant, si la démission ne se présume pas à elle seule, elle peut être déduite dans l’hypothèse où votre abandon de poste est accompagné d’autres indices ou circonstances démontrant votre volonté de ne plus revenir dans l’entreprise.


EXEMPLE

Vous être maçon et vous en avez assez de l’entreprise pour laquelle vous travaillez.
Vous décidez donc d’abandonner votre poste plutôt que de démissionner, pour recevoir vos indemnités chômage. Jusqu’ici votre plan a l’air de marcher.
Vous avez quitté le chantier sur lequel vous travaillez et vous n’avez pas répondu à l’injonction de votre employeur qui vous incitait à reprendre le travail.
Celui-ci fait quelques recherches et s’aperçoit que quelques jours avant de quitter le chantier, vous vous êtes inscrit comme demandeur d’emploi.
Ici, votre abandon de poste sera considéré comme étant une démission.


La jurisprudence a aussi qualifiée de démission l’abandon de poste d’un salarié ayant développé une activité personnelle importante dans le même secteur d’activité que celui pour lequel il travaillait pour son employeur.
Ainsi, même si la jurisprudence a tendance à peu retenir la caractérisation d’une démission par un abandon de poste, elle y est beaucoup plus ouverte lorsque certaines circonstances tendent à le démontrer.

Le droit de retrait

Vous souhaitez vous faire licencier, vous avez donc abandonné votre poste. Cependant vous craignez que celle-ci ne conduise à la caractérisation de votre démission, notamment lorsque certaines circonstances qui ont entourées votre abandon de poste peuvent faciliter cette conclusion.
Vous tentez le tout pour le tout et pour rattraper l’affaire, vous choisissez d’invoquer l’exercice de votre droit de retrait.

Le droit de retrait est celui par lequel vous pouvez arrêter d’exécuter vos tâches dans le cas où votre situation de travail présente un danger grave et imminent pour votre santé ou même votre vie.
Si vous ne parvenez pas à prouver que la situation est gravement dangereuse et imminente, votre employeur pourra exercer une retenue sur votre salaire.


EXEMPLE

Vous justifiez votre droit de retrait par le danger pour votre santé que représentent les courants d’air dont votre bureau est la proie.
Vous travaillez sur des chantiers et vous affirmez que la pluie et le vent sont des facteurs qui mettent en danger votre vie.
Dans ces 2 hypothèses, bien évidemment, les conditions d’application du droit au retrait ne sont pas réunies
Lorsque vous exercez votre droit au retrait alors que celui-ci n’est pas justifié, votre employeur pourra effectuer une retenue sur salaire le temps de votre absence et même vous licencier pour motif disciplinaire !


Enfin, si vous abandonnez votre poste pour un danger imminent existant réellement au sein de votre emploi, vous pourrez encore être licencié pour faute grave si vous ne l’avez pas mentionné et que cette absence à mis un de vos collègues dans une situation d’insécurité.

La retenue sur salaire

Votre employeur pourra cesser de vous payer votre salaire dès le jour où vous cessez de vous présenter sur votre lieu de travail.
Pour se faire, celui-ci n’aura qu’à prendre de vos nouvelles. C’est la première étape.
Si celui-ci reste sans réponse, celui-ci va pouvoir exercer une retenue sur salaire aussi longtemps que se fera votre absence. En effet, celui-ci n’a pas à vous payer dès lors que vous cessez de fournir du travail et que vous ne lui apportez pas les motifs de cette cessation.

La retenue sur salaire peut se faire sans même que votre employeur n’ait à saisir le juge pour qu’il se prononce sur la légitimité et le bien-fondé de cette suspension de salaire. Vous devez noter que cette retenue sera effective, peu importe que, durant votre absence injustifiée, vous soyez resté à la disposition de votre employeur.

La non-exclusion d’un licenciement pour faute grave

Vous pensez que l’abandon de poste est sans risque et est une solution facile pour qui veut se faire licencier pour faute simple afin d’éviter à avoir à démissionner ?
Détrompez-vous, un abandon de poste peut conduire à un licenciement mais aussi à bien moins avantageux pour vous : un licenciement pour faute grave.

A)   Simple licenciement ou licenciement pour faute grave

Pour pouvoir en arriver là et vous rendre la monnaie de votre pièce, votre employeur aura dû au préalable vous avoir adressé une mise en demeure de justifier votre absence ou de reprendre votre travail.
Celui-ci ne pourra engager une procédure de licenciement qu’au bout d’un certain temps de silence. C’est ce qu’il se passe dans la majorité des cas.
Vous pensez que vous allez vous faire licencier pour une faute simple du fait de vos absences injustifiées, cependant vos absences peuvent constituer une faute grave.

La faute simple est celle qui peut être retenue lorsque vous exécutez mal votre travail tandis que la faute grave est celle qui rend impossible votre maintien dans l’entreprise.
La gravité de la faute va donc être appréciée en fonction des circonstances entourant votre absence injustifiée.

B)    La possible qualification d’une faute grave

Est caractérisé de faute grave, votre abandon de poste qui aurait causé un dysfonctionnement dans l’organisation de l’entreprise. Les exemples tirés de la jurisprudence illustrent bien le fait que tout abandon de poste n’est pas seulement constitutif d’une faute sans importance mais peut constituer une faute grave.

Le licenciement pour faute grave est aussi grave que son nom le laisse à penser… Du moins pour vos indemnités !
En effet, contrairement au licenciement simple, si vous faites l’objet d’un licenciement pour faute grave, votre employeur ne vous devra ni votre indemnité de préavis, ni votre indemnité de licenciement.


EXEMPLE

Vous êtes collaborateur dans une entreprise.
Vous décidez de partir de l’entreprise de façon soudaine pendant une durée indéterminée et sans en informer votre employeur.
Votre absence a eu des conséquences particulièrement préjudiciables pour l’entreprise comme le blocage de prise de décision et donc le blocage de l’entreprise elle-même.
Votre abandon de poste pourra constituer un motif de licenciement pour faute grave.


Ne vous sentez pas à l’abri d’une pareille sanction si vous n’occupez pas à un poste à responsabilité et que votre absence n’aura que peu, voire pas du tout de conséquence sur la bonne marche de l’entreprise.
La faute grave pourra vous être encore imputée si ça n’est pas la première fois que vous abandonnez votre poste ou encore que vous ne justifiez pas d’une prolongation de votre arrêt de maladie malgré une mise en demeure de votre employeur de justifier votre absence.

Conclusion

Lorsque vous voulez quitter l’entreprise pour laquelle vous travaillez, réfléchissez à deux fois avant d’abandonner votre poste. Vérifiez que cette absence injustifiée qui parait être la solution idéale ne se retourne pas contre vous pour vous mettre un couteau dans le dos.