Burn out

La prévention du burn out – épuisement professionnel

Face au besoin d’expliquer le burn out ou épuisement professionnel, les spécialistes dans des domaines variés tentent de prévenir le risque de burn out. C’est pourquoi nous avons recueilli pour vous le témoignage de Sylvie Brière, fondatrice et présidente de l’Association France Prévention.

Sylvie Brière, de formation en sciences du travail et ayant une activité professionnelle depuis 41 ans, est fondatrice et présidente d’une association à buts culturels et éducatifs sur la prévention dans son extrême grande diversité.  L’Association France Prévention a pour buts d’informer mais aussi de mettre en relation et de soutenir les démarches de personnes en situation de demandes préventives en utilisant tous les modes de communication connus à cette heure.

L’Association a commencé sa campagne sur l’épuisement professionnel en 2012, après la parution d’un article dans l’Express. La décision a été prise par un constat des réalités de l’entreprise mais aussi des familles. Progressivement, les gens se sont intéressés à développer leur témoignage et, à ce jour, ils réclament des groupes de paroles et veulent témoigner aux côtés de Sylvie Brière lors de conférences. Au départ, personne ne voulait s’exprimer et surtout, la peur d’aggraver la situation posait une loi du silence.

I. Quel est l’état de la prévention du burn out aujourd’hui ?

A. LE RÔLE DE LA MÉDECINE DU TRAVAIL

Dans les moyens de prévention aujourd’hui, il y a la Le sujet sensible du burn out entame des coûts humains et de production, sujets confidentiels dans certaines structures. La médecine du travail, la gestion des risques et la prévention sont des actes internes à la responsabilité de l’employeur, qui exerce dans un espace privé lorsqu’il est dans son entreprise.
Sur un sens général la prévention doit se faire auprès des médecins. On y ajoute la détection de sujets de santé publique et/ou de risques psychosociaux dans un but d’ententes avec les partenaires sociaux. Si la situation a changé, on le doit aux soignants et plus particulièrement aux structures hospitalières. Il y a des médecins qui ont établi des protocoles de soins et qui ont aussi alerté. Cela a aidé les managers ou responsables de travailleurs à progresser dans leur comportement pour ceux qui sont les plus professionnels.

B. LES SALARIÉS ET LES RESSOURCES HUMAINES

Les salariés ont évidemment besoin qu’on les encadre sur les dangers de l’entreprise, seulement, les travailleurs ne sont pas tous réceptifs à ces soins « avant » le coup dur. Le BTP est un parfait exemple de travail long en plages horaires et long à comprendre le pourquoi des chaussures de sécurité ou du casque. Si le BTP était le seul secteur, ce serait facile, mais même les soignants ou les sauveteurs sont parfois défaillants. 
La prévention doit se faire aussi auprès des ressources humaines en général.Les patrons ou les dirigeants sont responsables de la sécurité morale et physique de leurs employés donc l’implication de l’employeur reste indispensable et centrale.
Pour la famille, le domaine de compétences est plus étendu encore puisque les lieux sont plus diversifiés et les espaces de vie peuvent échapper par la préservation du droit à une vie privée.

C. LA PRÉVENTION EN ENTREPRISE

La prévention en entreprise n’est pas récente et elle se complique ou se précise ou se formalise de façons totalement différentes suivant le secteur d’activité. Il y a des activités à hauts risques physiques (BTP, agriculture, les métiers roulants, les artisans dans les métiers manuels, etc.),  à hauts risques psychologiques (les soignants, les éducateurs, les RH, etc.), et parfois les deux sont conjugués (défense, santé, nucléaire…). Même un simple vendeur est informé et parfois éduqué à la prévention. Mais cette prévention n’est pas systématique même dans des structures imposantes.
J’ai fait des interventions en entreprise et on peut ou on doit y associer l’ergonomie. Ici, les méthodes ont leurs écoles et, parfois, les employeurs aboutissent à la fonction de harceleurs plutôt que de dirigeants responsables du bien-être moral et physiques des travailleurs.

II. Que doit faire un salarié ?

A. LE SALARIÉ SURMENÉ AVANT LE BURN OUT

Dans le cas d’une détection, il est quasi obligatoire de proposer au travailleur de rendre visite au médecin du travail. La forme de l’invitation est primordiale pour obtenir un accord de l’employé. En cas de refus, il y a une convocation possible vers le responsable des RH pour signifier le rôle de l’entreprise envers son salarié et les obligations des deux parties. Mais l’employeur est généralement plus proche dans les petites structures et la méthode devient presque amicale ou paternaliste. Il y a la solution de faire entrer la formation et/ou le délégué du personnel. Sur le terrain, les méthodes sont aussi multiples que les sociétés et les secteurs d’activités. Le nombre de salariés dans l’entreprise détermine les conduites et réponses du responsable. Faire appel à un intervenant extérieur reste la version que je préfère car elle neutralise les conflits ou les détecte au bon endroit, le plus souvent.
Dans cette situation d'avant burn out, il peut y avoir une phase transitoire qui consiste à prendre quelques jours de congés restants. Là, le travailleur peut faire ses démarches de soins dans un contexte plus confidentiel à ses yeux. Seulement, dans le cadre du burn out, les transactions, ou même les consignes dans le domaine de la préservation et de la conscience de ce syndrome, sont très complexes à imposer comme justifiées. La pédagogie n’est pas toujours suffisantes et elle n’existe pas s’il s’agit d’une situation de harcèlement et de cadences toujours accélérées.

B. LE BASCULEMENT DANS LE BURN OUT

Si le mot « basculer » s’apparente à « se brûler de l’intérieur », cet endroit-là est très différent d’une personne à l’autre mais les signes extérieurs sont souvent une disparition en éteignant tous les téléphones, en s’éloignant sans donner de nouvelles et, plus grave, en cherchant les méthodes de suicide. Comme on le dit dans le langage courant, il y a une atmosphère qui plane, elle est lourde de sens non dits. Il peut y avoir une phase d’addictions aussi, alors qu’elles n’existaient pas ou bien elles se renforcent. L’absence de régularité dans les soins comme manger, dormir et boire est un révélateur. Le syndrome d’épuisement à pour lui de tenir coûte que coûte et surtout dans le paraître. Alors lorsque la période de pertes de mémoire et d’actes manqués arrive, il y a camouflage assez souvent. Mais tout cela est dans la zone de l’œil du « cyclone épuisement » pour cette pathologie.
Tous les bons secouristes diront qu’il n’est jamais trop tard pour agir. Par contre, ils diront aussi que ce sont les dégâts qui sont moins faciles à retransformer si l’on est tardif. Mais la prévention reste une question d’appréciation et il ne faudrait pas non plus qu’elle touche son effet pervers en la posant comme un pansement sur une plaie infectée ou encore comme un remède que l’on fait boire de force. La maturité de la détection est importante.

III. Quels autres moyens de prévention ?

Le verbe, l’échange et la reconnaissance sont des outils créatifs. Le verbe, c'est-à-dire l’explication de ce syndrome ; l’échange, c'est-à-dire le regard sur d’autres vécus et enfin la reconnaissance, ce qui veut dire que l’ensemble des mal être de ce syndrome ne se placent pas sous des étiquettes standardisées de dépression ou de « chichi » ou de paresse… et le degré nettement au-dessus : comme une maladie mentale. L’épuisement n’est pas une maladie mentale mais bien, un phénomène provoqué par l’emballement de la machine corps. Cet état est poussé par un « harcèlement », au départ. Il indique qu’il faut réussir tous les défis même ceux qui sont en dehors des rythmes de nos horloges internes. Peut-on opposer que cette pression que l’on se met à soi-même est une déviance mentale ? Peut-être mais elle ne vient pas seule ou par atavisme, elle s’installe par un environnement favorable à cette situation et par un individu souvent très engagé, impliqué, auquel on ne laisse que le choix de se débrouiller seul ou bien encore de poursuivre dans les mêmes conditions ou encore de perdre ce qui lui est le plus cher (travail, argent, famille …).
Le questionnaire que j’ai mis au point pour mon association est précis et remet les personnes qui l’ont rempli en situation. Ils comprennent qu’on les comprend et il y a l’effet d’ouverture attendue. Lorsque les personnes mettent leurs coordonnées, je les appelle et il se passe un phénomène d’écoute mais surtout d’intérêt puisque c’est moi qui appelle. Et comme cela me parait très humain, je prends des nouvelles à temps espacés mais aussi, je propose des activités (par l’acte et pas la réflexion).

IV. Quels coûts pour le burn out ?

En milliers d’euros pour toutes les parties :

  • Travailleur : perte d’emploi ou baisse de salaire, déménagement, départ du conjoint, perte des enfants et des amis, soins médicaux avec ou sans hospitalisation, indemnités de maladie, RSA, APL, frais de justice… Perte de la retraite, handicap parfois…
  • Employeur : baisse de productivité, perte d’un employé souvent modèle, absence du salarié et son remplacement mais aussi sa rémunération, frais de justice…
  • Collectivité : frais pour soins médicaux portés par tous (mutualisation), obsolescence de la productivité d’une entreprise et manque à gagner direct mais aussi baisse de collectes d’impôts et absence de cotisations sociales, frais de justice, aides diverses comme les APL et les soins médicaux gratuits ou compléments de revenus et bien d’autres.

Les chiffres sont impossibles à émettre avec sérieux puisqu’aucun rapport n’est accessible au public mais l’on peut formuler un gigantisme improductif.

Conclusion :

L’humain ne peut s’extraire de besoins vitaux inéluctables mais aussi d’un rapport à l’autre (objet ou autre humain) qui soit sensible et rationnel, tout à la fois. Mieux vaut prévenir que guérir mais encore faut-il être écouté.